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Choix d'œuvres

Atelier du 3e étage
Peinture

Saint Georges et le Dragon d'après Carpaccio

Quant à Carpaccio, je vous en parlerai quand je pourrai trouver assez de formules admiratives pour cela ; quel peintre !

Brouillon d’une lettre de Gustave Moreau à Edgar Degas [début octobre 1858]

 

Le séjour en Italie

En 1849, après deux échecs au Prix de Rome, Gustave Moreau quitte l’École des Beaux-Arts. Fidèle à la tradition académique de l’époque et afin de compléter sa formation, il décide quelques années après de faire - à ses frais - un voyage d’étude en Italie. 

D’octobre 1857 à septembre 1859, il séjourne à Rome, Milan, Venise et Naples. À Rome, il fréquente les pensionnaires de la Villa Médicis et se lie d’amitié avec Degas. À Venise, où il séjourne de mi-septembre à décembre 1858, il étudie et copie les œuvres du peintre Vittore Carpaccio. 
Contemporain de Michel-Ange et de Raphaël, ce peintre attire l’attention des artistes dans les années 1850, dont Théophile Gautier qui, dans son Voyage en Italie, s’enthousiasme pour l’artiste : « Nous sommes étonnés que le nom de Carpaccio ne soit pas plus généralement connu ; il a toute la pureté adolescente, toute la séduction gracieuse du peintre d’Urbin [Raphaël] dans sa première manière, et de plus cet admirable coloris vénitien qu’aucune école n’a pu atteindre ». 

Cet art du coloris correspond aux intérêts de Moreau qui entend se consacrer, comme il l’écrit à ses parents, à des « études de valeur et de tons décoratifs », et les nombreuses copies qu’il réalise d’après les compositions monumentales de Carpaccio durant son bref séjour à Venise témoignent d’une véritable fascination pour lui. 

Degas qui l’attendait à Florence, dans une lettre datée du 27 novembre 1858, dut le rappeler à l’ordre : « c’est assez de complaisance vis-à-vis de vos penchants à la couleur […] car j’ai une grande envie de vous revoir avant de m’en aller en France, et vous m’aviez promis d’être moins longtemps absent. […] Allons, roulons ce fameux Saint Georges, et les petits morceaux d’après Carpaccio et venons dessiner un peu ici ».

 

Moreau et Carpaccio

Saint Georges et le Dragon est conservé à la Scuola San Giorgio degli Schiavoni, au rez-de-chaussée, dans la salle dite des Dalmates.

Pour copier cette œuvre, Moreau a d’abord effectué, à l’aide d’un calque, un relevé précis de la composition. Un échafaudage lui fut sans doute nécessaire car elle est encastrée en hauteur dans les boiseries.

Ce relevé, toujours conservé au musée, fut ensuite soigneusement reporté sur la toile. Une fois achevée, le peintre roula sa copie et l’expédia, le 28 novembre 1858, à Paris. Une autorisation délivrée par l’Accademia delle Belle Arti de Venise en témoigne.

Parmi les autres tableaux de Carpaccio copiés à Venise, signalons ceux eux aussi conservés à la Scuola : Saint Jérôme conduisant au monastère le lion blessé et le Triomphe de saint Georges, mais aussi quatre des neuf épisodes de La Légende de Sainte Ursule exposés dans les galeries de l’Académie (L’Arrivée des ambassadeurs chez le roi de Bretagne, Le Départ des ambassadeurs, La Rencontre avec le pape à Rome, L’Apothéose de sainte Ursule).

Moreau choisira bien plus tard d’accrocher ces copies dans le Cabinet de réception au 1er étage de sa maison-musée, où elles sont toujours visibles.

Inv. 13612 - Copie d'après Départ des ambassadeurs de Carpaccio
Gustave Moreau, Copie d'après Départ des ambassadeurs de Carpaccio, huile sur toile, Inv. 13612, 1,03 m x 0,94 m © RMNGP / René-Gabriel Ojeda
Inv. 13633 - Copie d'après Arrivée des ambassadeurs chez le roi de Bretagne de Carpaccio
Gustave Moreau, Copie d'après Arrivée des ambassadeurs chez le roi de Bretagne de Carpaccio, huile sur toile, Inv. 13633, 0,30 m x 0,60 m © RMNGP / René-Gabriel Ojeda
Autorisation délivrée par l’Accademia delle Belle Arti de Venise
Autorisation délivrée par l’Accademia delle Belle Arti de Venise © musée Gustave Moreau

 

Au début du mois de juin 2024, la copie de Saint Georges et le Dragon de Vittore Carpaccio (c. 1465 – c. 1525) a été restaurée par Véronique Sorano-Stedman.

Possédant les mêmes dimensions que l’originale, cette toile du fait de sa taille imposante (3,58 m x 1,40 m) n’a jamais quitté l’atelier du 3ème étage depuis l’ouverture du musée en 1903. Son décrochage des cimaises constitue donc un évènement qui offre à l’équipe scientifique du musée une occasion exceptionnelle de l’observer et de l’étudier de près. 
Cette œuvre a été décrochée et restaurée pour la dernière fois il y a plus de 30 ans, à l’occasion de la rénovation des salles du 3ème étage menée en 1993 sous la direction de Geneviève Lacambre, alors directrice du musée. L’intervention avait alors permis de consolider la toile originale, très fragile, et de décrasser la couche picturale assombrie par l’oxydation du vernis et une importante couche de poussière.
L’étoffe qui recouvrait le cadre depuis l’origine, très déchirée et devenue brunâtre, a été déposée et remplacée par un tissu de texture identique, fabriqué et teint spécialement d’après les couleurs retrouvées sur quelques fragments protégés de la lumière (de couleur rose intense avec un motif de points jaunes). Cette opération avait reçu le soutien financier des Amis du musée.

Le décrochage : une opération complexe et délicate

Décrochage St Geroges Décrochage St Geroges

 

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